Les travailleur·euse·s de ce secteur réalisent des tâches ménagères chez les particuliers. Des courses ménagères au nettoyage des vitres et des sanitaires, des petits travaux de couture en passant par le repassage que ce soit à domicile ou en ateliers.
Trois types d’entreprises constituent le secteur. Les entreprises d’insertion où il n’y a pas d’actionnaire, les entreprises à but commercial où la rentabilité est une priorité puisque derrière il y a des actionnaires et les Agence Locale pour l’Emploi (ALE).
Le secteur compte en majorité des femmes dont 60% sont des familles monoparentales. Le plus souvent, les contrats sont à temps partiel non voulus soit parce que physiquement il n’est pas possible de prester un temps plein soit parce que les employeurs n’ont pas la possibilité ou la volonté d’octroyer ce type de contrat.
Nos revenus sont de +/- 11.80 € brut de l’heure. En moyenne, nous gagnons pour 29 heures par semaine environ 1150 € net par mois, ce qui ne permet pas de vivre dignement. Il n’est pas possible de payer l’entièreté des factures avec un si petit salaire. La plupart des travailleur·euse·s doivent faire des choix entre payer le chauffage, les soins de santé, les vêtements. Il est rare que les travailleur·euse·s puissent s’octroyer un plaisir ou faire plaisir à leur famille. Aller au cinéma, au restaurant ou en vacances, ce n’est pas pour les travailleur·euse·s des titres-services. C’est épuisant de devoir tout calculer au cent près, mois après mois, pour finalement se rendre compte que nous allons juste survivre et non vivre, qu’une fois de plus nous allons dire « non » à nos enfants pour nous permettre des achats nécessaires.
En dehors de nos revenus précaires, c’est la totalité de nos conditions de travail qui sont inacceptables.
Nos corps ne peuvent pas tenir la cadence. Après quelques années passées dans ce secteur, des douleurs apparaissent, quel que soit l’âge du/de la travailleur.euse : troubles musculo squelettiques, canal carpien, tendinites etc. Mais ce n’est pas tout ! Vu qu’une grande partie du secteur est aux mains du privé, la pression psychologique est bien là. Lorsque nous nous rendons chez le médecin, nous esquivons le certificat de peur de perdre nos client·e·s et qu’un·e autre nous remplace. Nous avons peur des rendez-vous de recadrement de l’employeur où on nous dit « tu es trop souvent malade, comptes-tu faire des efforts et ne plus rendre de certificats ? Sinon je vais devoir te licencier ».
Comment peut-on faire un effort ? Nous ne choisissons pas d’avoir la grippe ou de devoir subir une opération parce que notre job a bousillé notre santé à petit feu !
Première grève dans le secteur des titres-services
Nos conditions sont pénibles et les employeurs ne nous montrent aucun respect. Pour preuve, lors de l’AIP 2019-2020, la marge salariale était fixée à 1.1% d’augmentation. 1.1 % sur un salaire misérable, ce n’est déjà pas grand-chose. Pourtant les plus grosses entreprises du secteur ne voulaient nous accorder aucune augmentation. Peut-être croyaient-ils que les aide-ménagères allaient accepter sans réagir ?
Avec la FGTB, nous avons organisé notre première grève le 28 novembre 2019. Les délégué·e·s ont mobilisé les travailleur·euse·s, ils et elles ont expliqué l’importance de montrer notre mécontentement et que même si nous ne nous connaissions pas, nous étions tous et toutes concerné.e.s.
Il est certain que les 1,4 million de travailleur·euse·s du secteur n’ont pas fait grève, mais nous étions plus de 1000 et la colère était bien présente. Il a fallu beaucoup de volonté et de mobilisation, les travailleur·euse·s ont pris leur courage à deux mains pour dénoncer la situation et la presse était au rendez-vous.
Nous avons reçu le soutien des client·e·s et de la population. L’entièreté du pays, suite à cette grève, sait qui sont les travailleur·euse·s du secteur des titres-services. Nous avons arraché 0.8% après des mois de lutte. Beaucoup dirons oui mais ce n’est pas 1.1%. Peut-être pas en effet, mais c’est mieux qu’aucune augmentation et c’est la preuve que la lutte paye.
La crise sanitaire n’a pas épargné les aide-ménagères.
Lorsque la crise sanitaire est venue perturber nos vies, notre secteur a été fort impacté. Le virus a effrayé tout le monde, à juste titre. Notre première crainte était la peur de contracter le virus, et ensuite celle de le transmettre à notre famille ou à nos client·e·s. La peur des client·e·s était elle aussi bien présente ; la majorité a d’ailleurs annulé nos prestations. Suite à cela, nous avons perçu du chômage temporaire :70 % du salaire brut moins le précompte professionnel. Ce qui nous a plongé en grande partie dans la précarité, le montant perçu ne permettant même plus de payer notre loyer.
Le secteur n’a jamais fermé, il a été considéré comme secteur essentiel pendant la crise. Mais pas essentiel pour tou·te·s…. Aucune prime pour les aide-ménagères et pire : une perte sur la prime de fin d’année.
Et maintenant, la proposition de la marge pour le prochain AIP n’est que de 0.4% tout en sachant que notre secteur a travaillé tout au long de la crise, que la plupart des entreprises engagent de nouveaux travailleur·euse·s tous les mois, que des grosses entreprises en rachètent de plus petites. Mais les grands patrons ont le culot de répondre qu’ils n’ont pas d’argent. C’est inacceptable.
Tant que les travailleur·euse·s n’auront pas un salaire digne et des conditions de travail acceptables, nous continuerons à lutter.
Amandine Staelens, Déléguée Centrale Générale Titres-Services
Camarade – Mars 2021